Avant de dire non à Pascal Houzelot, lui empêchant de revendre sa chaîne Numéro 23 à NextRadioTV, le CSA avait donné son feu vert. C'était en mars 2012. A cette époque le CSA doit distribuer des fréquences pour lancer six nouvelles chaînes de télévision gratuites. Les groupes TF1, M6, NRJ et NextRadioTV sont tous assurés d'avoir un canal pour lancer respectivement HD1, 6ter, Chérie25 et RMC Découverte. Il reste deux canaux, dont l'un sera offert à Pascal Houzelot pour son projet de chaîne de la diversité.
Dans une grande enquête cette semaine, TéléObs revient sur les coulisses de cette décision. L'hebdomadaire raconte notamment comment Nicolas Sarkozy a oeuvré pour que l'un des canaux soit attribué à L'Equipe 21, pour avoir, en pleine campagne présidentielle, "dans son camp l'autre quotidien du groupe Amaury, 'Le Parisien'". L'heureux destinataire de la dernière fréquence a été choisi directement par le CSA. Avec 7 voix sur 9, Pascal Houzelot l'emporte parmi 30 projets.
L'hebdomadaire est allé interroger Michel Boyon. Celui qui présidait alors le CSA à l'époque ne reconnaît aucune responsabilité dans l'affaire actuelle. "Nous étions très conscients du risque - minime par rapport aux enjeux de l'audiovisuel - tenant à la pérennité de l'entreprise, nous l'avons assumé délibérément et je ne le regrette pas", explique-t-il. "Personne ne peut prétendre que Pascal Houzelot ait roulé le CSA au moment où nous nous sommes décidés", ajoute-t-il, indiquant avoir été "conforté" dans son choix par les noms prestigieux des actionnaires de la chaîne mis en avant par Houzelot : Xavier Niel, Bernard Arnault, Jacques-Antoine Granjon ou Jean-Charles Naouri, etc.
Mais TéléObs explique comment Pascal Houzelot a leurré les Sages. Ses très célèbres cautions ne représentaient que 15% d'un capital de départ de seulement 11.765 euros. Une somme dérisoire pour lancer une chaîne de télévision ! L'homme d'affaires, qui avait déjà lancé sans grand succès la chaîne PinkTV, a pu compter sur le soutien de solides réseaux. Manuel Valls, Fleur Pellerin, Emmanuel Macron, Bertrand Delanoë et Anne Hidalgo dînent régulièrement dans son appartement privé, tout comme Xavier Niel, Bertrand Méheut, Alexandre Bompard, Stéphane Richard et Alain Weill, les dirigeants de Free, de Canal+, de la FNAC, d'Orange et de BFMTV. Michel Boyon et son successeur Olivier Schrameck sont également parfois les "hôtes" de Houzelot.
L'ancien patron des Sages regrette seulement que la taxe sur les plus-values de ventes de fréquences ne soit pas de 50% et juge "choquant" qu'elle n'ait été un temps que de 5%. Notre consoeur revient sur la difficile adoption de cette taxe, qui n'était pas soutenue par Emmanuel Macron. Elle raconte aussi comment certains des membres du CSA n'ont pas insisté pour que la convention de Numéro 23 contienne davantage d'obligations de production et de diffusion d'oeuvres françaises. "Avec mon collègue Alain Méar, nous avons tenté de charger la mule. Mais on a été battus en rase campagne", se souvient, amer, Rachid Arhab.