C'est un numéro un peu spécial que les habituelles lectrices de "Elle" auront entre les mains cette semaine. Le dernier de Valérie Toranian, patronne du journal depuis 1994. Poussée vers la sortie par la direction, la rédaction a voté une motion de défiance à l'encontre d'Arnaud Lagardère, propriétaire du magazine. L'équipe de Valérie Toranian lui rend un joli hommage en page 22, avec un texte qui lui est adressé.
"La barre, Valérie, tu la mets toujours très haut : pour ce journal, tu as eu autant d'idées que de cheveux. Tu nous as fait bosser comme des ânes, tu nous as obligées à karaoker du Charles Aznavour des nuits entières, écrivent les journalistes. Tu nous as imposé le port de la jupe crayon, laquelle, maintenant on peut le dire, n'allait pas à tout le monde. Tu nous as dix fois demandé notre avis sur les couvertures, pour systématiquement en choisir une autre... C'est toujours toi qui avais raison, et ça on ne te le pardonnera jamais".
Outre ses atouts professionnels, les journalistes de "Elle" louent à Valérie Toranian de grandes qualités humaines. "Tu as toujours été la femme la plus droite, la plus loyale du monde. Nous savions que tu te serais fait couper la tête (mais pas les cheveux) pour nous et pour la grande idée que tu te fais des femmes, poursuit la rédaction. Ta bienveillance nous a portées, nous a fait grandir, pendant des années. Puisse le vent t'emmener, toi et ton rire, toi et ton intensité, toi et tes jolies boucles, vers des aventures à ta hauteur".
Valérie Toranian signe son dernier édito dans lequel elle remercie ses équipes et la direction du journal confirme aux lecteurs l'arrivée de sa remplaçante, Françoise-Marie Santucci, ex-journaliste de "Libération".
Lagardère, propriétaire du magazine "Elle", souhaite relancer l'hebdomadaire féminin dont les ventes sont passées de 380.000 exemplaires en 2010 à 350.000 en 2014, en raison de la crise de la presse ainsi que de la nouvelle concurrence de "Grazia" et "Vanity Fair".
Mais les salariés de "Elle" dénoncent la vision "dramatisée" de leur direction et estiment que leur magazine s'en sort "beaucoup mieux que ses concurrents face à la crise". Les salariés s'interrogent sur la stratégie et redoutent une atteinte à l'indépendance éditoriale du journal.