Après une première expérience l'an dernier, Marianne James est de retour pour son deuxième Eurovision. Cette semaine, l'artiste est à Stockholm pour commenter les demi-finales et la finale du concours européen de la chanson. Mardi, elle a fait équipe avec Jarry, qu'elle retrouvera ce soir à 21h sur France 4 pour la deuxième demi-finale, tandis qu'elle retrouvera son complice de l'an dernier samedi soir pour la finale diffusée sur France 2 et RFM. A quelques heures de la deuxième demi-finale, Marianne James a répondu aux questions de puremedias.com sur l'engouement autour d'Amir, les critiques envers le concours et ses favoris.
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Propos recueillis par Charles Decant.
C'était une évidence de revenir cette année pour l'Eurovision ?
Oui. C'est plus qu'une continuité, c'est une famille. Je savais que j'allais être surprise l'année dernière, on m'avait prévenue que j'allais être embarquée plus loin que je ne pensais. Et j'ai passé mon année à expliquer aux gens ce que j'avais vécu de l'intérieur. Ici, est-ce que c'est le beau temps, l'organisation impeccable, mais ça se passe encore mieux. La délégation française est plus en adéquation avec le titre d'Amir, on ne va pas se le cacher. Nous sentons l'engouement aussi. Nous travaillons de concert avec Stéphane Bern, Jarry, France 2, France 4, à tordre un acier trempé dans l'autre sens en France.
C'est-à-dire ?
La première demi-finale a été suivie par 2,5 millions de téléspectateurs en Suède. En France, on estime qu'on a cartonné avec 530.000 personnes alors qu'il y a 66 millions de Français. La marge de progression est absolument énorme. Certes, il y a une kitsch attitude, que j'aime et que je revendique : franges, masques, chorégraphies improbables, titres bizarres, langues inconnues, maquillage à l'ouest... J'aime quand il y a ces faux pas, ce côté amateur mais plein de passion. Après, ça se professionnalise.
Jarry disait que le concours est "de moins en moins drôle et de plus en plus professionnel"...
Le niveau est tellement exceptionnel partout qu'on a besoin de beaucoup plus travailler pour aller chercher les différences. Donc je dois essayer de faire comprendre aux Français à quel point nous sommes fiers de ne pas parler de guerre, de commémoration, ça n'est pas le Mondial de l'automobile, ou du football... C'est juste de la chanson. Moi j'aime quand elle est dark, quand elle est pop, quand elle est rock, j'aime quand il y a du gros son. Je dis aux gens qu'ils devraient visionner la cérémonie avec un système son, pas seulement avec le son de la télé parce que vraiment, nous, on en prend plein les oreilles. Et nous sommes là, Stéphane, Jarry et moi pour transmettre cette émotion, au delà du son et de l'émotion, de dire que c'est quand même extraordinaire de réunir l'Europe entière. Une sorte de Schengen réussi.
Vous avez assisté aux répétitions de la deuxième demi-finale, quelle surprise réservent les animateurs ce soir ?
Je suis soufflée par le professionnalisme de Mans et Petra qui animent la cérémonie. Leur numéro de comédie musicale ce soir est magistral ! Ca m'a fait penser à la prestation de Hugh Jackman aux Oscars l'an dernier. Ca ouvre la soirée et c'est la fête de toutes les nations. Je les trouve encore meilleurs que sur la première demi-finale.
Et côté prestations ?
Notre assistant, Quentin, qui est dans la cabine avec nous, observe toujours notre incroyable énergie pendant les prestations. Et tout d'un coup, hier, reprise d'antenne pendant la répétition, pas un mot. Ni de Jarry, ni de moi. J'étais tellement dans mon émotion et j'ai tourné la tête et Jarry était dans le même état. On n'a pas checké la prestation qui arrivait derrière, Quentin ne comprenait pas pourquoi on ne disait rien. Mais on a été cueilli, sans mots après la prestation de la chanteuse ukrainienne qui chante en anglais et en tatar, un titre sur l'exode violent et brutal des Tatars en 1944. La prestation de l'Israélien aussi, maquillé, un peu rond, à mi-chemin entre ce qu'il est et ce qu'il sera bientôt, c'est-à-dire un être qui se cherche. Le gars commence à chanter, c'est le petit frère d'Adele...
Et c'est ce qu'il faut transmettre au téléspectateur...
Oui, notre rôle, c'est de transmettre ça, même si les gens ont les moyens chez eux, sans nous, de comprendre tout ce qui se passe. En France, encore aujourd'hui, il va falloir détordre cet acier. Les "On ne gagne jamais", les "C'est ringard", les "De toute façon, on chante en anglais, quel intérêt", les "Il est plus Israélien que Français, pourquoi encore un juif" et autres horreurs... Les Français ont le don en ce moment - ils ne sont pas nombreux, mais ils occupent toute la toile - de baver, de dire que tout est de la merde. Même quand tout va bien, ils trouvent le moyen de dire que ça ne va pas. C'est une maladie, ça s'appelle la dépression. Moi, ça me donne une force pour dire que le joyau de l'Eurovision est vraiment brillant et que j'en ai marre qu'on lui crache dessus.
On ressent cette force dans vos commentaires !
Parfois on est too much, on en a conscience avec Jarry dans la cabine, et en même temps, on ne peut pas nous reprocher de ne pas vibrer. Mais je comprends que certains nous aient tweeté de nous taire !
On parlait des audiences tout à l'heure. Quel score aimeriez-vous réaliser avec la finale samedi ?
J'aimerais qu'on atteigne les six ou sept millions pour la finale, ça traduirait un retour en amour. J'aimerais que ça devienne un rendez-vous pour les Français, un peu comme il existe Noël, la Coupe du monde de foot, les soldes...
Si on gagnait, ça changerait l'attitude des Français ?
Si on frôlait le podium, je crois que les choses changeraient, oui. Et c'est possible ! Je rêve d'être dans les trois premiers. Si on arrive dans le top 5, je serai très heureuse. Le niveau est exceptionnel, derrière Israël, derrière l'Arménie, l'Ukraine, la Russie, la Belgique, la Bugarie... Cette nuit, au lieu d'aller à l'Euroclub, je suis tombée dans ma chambre d'hôtel sur la retransmission de la première demi-finale à la télé... Et je l'ai regardée. Après l'avoir commentée et préparée en amont, est-ce que j'avais besoin de manger deux heures de programme suédois ? Mais je me suis fait piéger ! C'est fort !