Libération va-t-il devenir un réseau social ? C'est en tout cas ce que semblent souhaiter les actionnaires du quotidien. Dans un texte mis en ligne hier sur le site de Libération, ces derniers ont ainsi exprimé leur intention de faire du journal "un réseau social, créateur de contenus monétisables sur une large palette de supports multimédias (print, vidéo, tv, digital, forums, évènements, radio, etc.)". Selon eux, ce projet pourrait fournir à Libération "de très forts relais de croissance" alors même que le quotidien rencontre actuellement de sérieuses difficultés financières.
Dans leur texte, les actionnaires ont aussi annoncé que le déménagement de la rédaction de Libération, située actuellement en plein coeur de Paris, était devenu "inéluctable". Ils ont également fait savoir qu'ils entendaient transformer le siège actuel du journal en "un espace culturel et de conférence comportant un plateau télé, un studio radio, une news room digitale, un restaurant, un bar, un incubateur de start-up". Ce "lieu d'échange ouvert et accessible à tous, journalistes, artistes, écrivains, philosophes, politiques, designers" serait "entièrement dédié à Libération et à son univers" dans l'esprit d'un "Flore du XXIe siècle, carrefour de toutes les tendances politiques, économiques, ou culturelles" en misant sur "la puissance de la marque Libération".
Toutes ces annonces n'ont visiblement pas rassuré les salariés de Libération, loin de là. Ces derniers, en grève jeudi dernier, ont ainsi utilisé la propre Une du quotidien pour exprimer leur profond rejet du projet des actionnaires. "Nous sommes un journal, pas un restaurant, pas un réseau social, pas un espace culturel, pas un plateau télé, pas un bar, pas un incubateur de start-up" peut-on ainsi lire en Une de l'édition d'aujourd'hui.
"NOUS SOMMES UN JOURNAL" - la une de Libé ce week-end http://t.co/srVrYR7t73 pic.twitter.com/NfaBl3n4zM
- Libération (@liberation_info) 7 Février 2014
Dans un texte lui aussi mis en ligne sur le site du journal, les personnels de Libération ont ainsi parlé de "foutage de gueule", d'"insulte" et de "bras d'honneur" à propos de ce texte des actionnaires qui a, selon eux, "de nouveau radicalisé le conflit à Libération". Dans un éditorial, les salariés ont expliqué que "le projet des actionnaires (...) a provoqué la stupéfaction puis la colère de l'équipe, tant il est éloigné de (leur) métier et de (leurs) valeurs". Selon eux, "il n'offre aucune perspective d'avenir sérieuse au journal". Et les salariés de conclure : "S'il était appliqué, Libération se verrait ramené à une simple marque. Les semaines qui viennent s'annoncent difficiles, mais nous restons unis et déterminés". Un nouveau préavis de grève a été déposé pour dimanche.