Vendredi soir, Pierre Fraidenraich a été nommé patron du journal "Libération", remplaçant Nicolas Demorand, qui a démissionné le 13 février dernier. L'ancien directeur d'i-TELE, qui avait fait une entrée discrète au conseil de surveillance du journal en février dernier, est devenu le directeur opérationnel du quotidien. Une nomination que les journalistes de la rédaction du titre ont appris en lisant leurs dépêches AFP...
Hier soir, les salariés de "Libé" ont publié un portrait très sévère de leur nouveau patron, intitulé "Qui est donc Pierre Fraidenraich ?". Ils débutent leur article en écrivant avoir reçu, lors de l'annonce de sa nomination, une avalanche de textos "de compassion" de la part de "confrères qui ont eu affaire à lui". "Il n'a rien à voir avec le journalisme", "Oh mes pauvres...", "C'est la fin pour vous", "Il n'a pas laissé de bons souvenirs", "autoritaire", "réseauteur", compile l'article.
"Libération" se montre extrêmement critique avec les précédentes expériences professionnelles de son dirigeant, rappelant même une "casserole" du journaliste datant de 1997. Alors qu'il est le présentateur du "Soir 3", France 3 est très critiquée pour avoir prêté les décors et le générique de son "19/20" pour un "faux JT" publicitaire à la gloire d'un laboratoire pharmaceutique.
L'article insiste ensuite sur le modèle de "journalisme low-cost" que Pierre Fraidenraich a mis en place à i-TELE. L'article est d'ailleurs très sévère sur son bilan à la tête de la chaîne d'information en continu du groupe Canal+. "En 2008, le voilà donc directeur général de la chaîne info avec pour mission de rattraper le retard sur BFMTV. (...) A son arrivée, BFMTV vient de passer devant i-Télé (...) En janvier 2012, quand il quitte i-Télé, la chaîne est à 0,8% quand BFM caracole à 1,5%", écrivent nos confrères qui rappellent également, qu'à l'époque il a recruté Robert Ménard, nouveau maire Front National de Béziers, pour intervenir dans plusieurs émissions.
Dans ce portrait peu flatteur, "Libération" dénonce surtout deux caractéristiques de Pierre Fraidenraich. La première est d'avoir régulièrement mis à l'antenne de jolies journalistes. "Au sein de la chaîne, on se rappelle encore, pas très émus, ses blagues 'lourdes' et sa ligne éditoriale d'airain quant à la coiffure et au décolleté des jeunes femmes journalistes", souligne l'article.
Mais c'est le réseau de leur nouveau patron que fustigent principalement les salariés de Libération. Pierre Fraidenraich serait un proche de Nicolas Sarkozy et de Jean-René Fourtou, président du conseil de surveillance de Vivendi, maison-mère de Canal+. Ce dernier avait mis en place un groupe de civils (dont Gérard Carreyrou, Charles Villeneuve et Etienne Mougeotte) pour oeuvrer à la réélection de Sarkozy en 2012. "Libé" indique que Pierre Fraidenraich fréquente également d'autres proches de l'ancien président de la République comme Stéphane Courbit, Patrick Bruel ou Christine Ockrent.
La conclusion de ce portrait, empli de défiance, est sans appel. Les journalistes terminent par un témoignage anonyme venu d'un salarié d'i-Télé. "Ce n'est pas un journaliste mais un entrepreneur. Je l'aurais bien vu à Men's health, ou à L'Equipe, mais pas Libé. Non, pas Libé." Après cet article, peu de chance que Pierre Fraidenraich se sente le bienvenu en arrivant dans les locaux du journal...