"TF1, les Français, Ensemble". Voilà comment Rodolphe Belmer, le président directeur général de TF1 résumer la rentrée 2023/2024 de la première chaîne de France face à la presse il y a quelques jours. En marge de cette conférence organisée pour présenter les nouveautés de la grille des programmes de la Une et des autres chaînes du groupe, Fabrice Bailly, directeur des programmes et des acquisitions du groupe TF1, a accepté de répondre aux questions de puremédias.com.
Propos recueillis par Benjamin Rabier
Puremédias : En regardant le line-up de rentrée de TF1, on a le sentiment que trois mots résument la saison prochaine du groupe : Divertir. Légèreté. Humour.
Fabrice Bailly : Je rajouterais aussi : rassembler. Nous voulons rassembler toutes les générations en offrant des programmes diversifiés, riches avec énormément de nouveautés tout en s'appuyant sur nos marques fortes. On veut donner une tonalité très feel good à nos programmes sans pour autant s'interdire d'aborder les sujets importants de la société. Je pense que le meilleur exemple en la matière c'est "Lycée Toulouse Lautrec" qui réussit à traiter d'un problème de société (l'intégration des non-valides) avec beaucoup d'autodérision et d'humour. Je pense que c'est avec ce ton-là qu'on arrive le mieux à faire passer les messages.
Est-ce que cette envie de légèreté a été accentuée par les années Covid et l'actualité anxiogène de ces derniers mois ?
Bien sûr. La pandémie puis ensuite la crise économique et sociale, l'incertitude internationale ont été des sources d'anxiété pour les Français. Ils ont besoin lorsqu'ils allument leur poste de télévision, leur tablette, leur portable ou leur ordinateur, de se divertir tout en continuant à s'enrichir et à apprendre des choses. Le mantra de TF1, "informer et divertir" est plus que jamais d'actualité.
"Notre ambition est de devenir la première destination gratuite d'information et de divertissement familial en France sur le linéaire et le non linéaire"
Le streaming est devenu incontournable pour les chaînes de télévision. Est-ce que cela a changé quelque chose dans vos choix de commander ou d'acquérir certains programmes ?
Notre ambition, impulsée par Rodolphe Belmer est de devenir la première destination gratuite d'information et de divertissement familial en France sur le linéaire et le non linéaire. Nous allons nous appuyer sur une ligne éditoriale forte composée de grandes franchises événementielles, sérialisées et qui génèrent de l'écoute conjointe. On propose des programmes pour les antennes linéaires du groupe TF1 qui, en général, s'ils cartonnent en linéaire, cartonnent en replay sur le digital. C'est le cas de "HPI", d'"Ici Tout commence", "Demain nous appartient" et beaucoup de fictions françaises. C'est le cas aussi pour des programmes de flux comme "Koh-Lanta". Cette offre de programmes est déjà enrichie d'une offre purement digitale. sur MyTF1, 50% des programmes qui sont des contenus exclusifs (notamment avec une offre très importante de plus de 100 films).
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Depuis plusieurs années, les séries américaines sont en perte de vitesse. Comment avez-vous pallié cette situation ?
Il est vrai que l'offre disponible pour les chaînes linéaires s'est amoindrie. Aux États-Unis notamment, , les plateformes ont accéléré cette tendance. En conservant leurs séries pour leur plateforme. Il y a donc assez peu de séries qui sont disponibles sur le marché aujourd'hui. Mais une forme de réalisme économique tend à inverser cette tendance car il est difficile de financer uniquement via le streaming. Dans cette logique un certain nombre de séries américaines vont redevenir disponibles sur le marché et c'est une excellente nouvelle car TF1 est l'une des rares chaînes, qui continue à garder une case et demi de séries US en prime-time. Pour compenser ce phénomène, on a développé des co- productions internationales comme (" Unité 8200 ", une série avec Patrick Bruel) et (" Le Club des 5 "). On s'est aussi intéressés à des séries d'autres nationalités, le meilleur exemple étant " Doc ", une série italienne qui connait un grand succès en prime time sur TF1. Dans la même dynamique, on a ouvert une troisième case de flux le mardi avec "Koh- Lanta", "Mask Singer" avec une volonté d'offrir en prime-time une grande variété de genres. Notre offre est toujours aussi variée et propose au public de La fiction française du flux, des séries étrangères et du cinéma.
'Grey's Anatomy', 'The Resident' ont du mal à rassembler sur les 4+ sur TF1. Vont- elles rester en prime-time ?
Ces séries fonctionnent très bien sur le streaming. Sur les 4+, c'est vrai que c'est un plus faible mais elles marchent très bien sur cibles. Aujourd'hui, la difficulté de notre métier, qui a beaucoup changé, c'est d'être dans un équilibre permanent entre des programmes puissants sur 4+ et ceux performants sur cibles. Notre objectif est toujours offrir une variété de programmes à nos téléspectateurs.
Dans les nouveautés fictions de votre line-up 2023/2024, on a le sentiment qu'"HPI" a infusé la plupart de vos prochains projets...
Il y a en effet une volonté de fictions feel-good mais avant "HPI", dans cette même tendance il y avait "Munch" ou "Balthazar", avec des personnages atypiques parfaitement incarnés. "HPI" a enfoncé le clou de manière assez magistrale. Nous proposerons ainsi cette saison "Le Daron", "Le Négociateur", "Mademoiselle Holmes", "Le fil d'Ariane", "Master Crimes", "Panda", "Mercato" qui ont tous la particularité d'avoir des grands comédiens, des grandes comédiennes dans des rôles atypiques. Cela ne nous empêche cependant pas de continuer à proposer des mini-séries policières comme "Brocéliande" ou encore "Rivières Perdues". On propose également de la comédie familiale, de la saga historique ou la série d'action.
"La spécificité de la télévision linéaire est de proposer des héros récurrents, bouclés, qu'on aime retrouver"
Lancer une série feuilletonnante sur plusieurs soirées sur TF1 en 2023, c'est compliqué ?
C'est plus compliqué oui. La spécificité de la télévision linéaire est de proposer des héros récurrents, bouclés, qu'on aime retrouver. Ce genre-là est plébiscité par les téléspectateurs en télévision linéaire mais aussi très consommé en streaming. C'est l'addiction au programme qui compte et ce n'est pas parce que vous faites du feuilletonnant que c'est plus addictif. Les gens sont addicts à nos personnages.
Côté séries, on retrouvera Nolwenn Leroy, Julien Doré, Booder... On a l'impression que vous développez une écurie de talents chez TF1.
TF1, c'est la maison des talents. Un agent m'a dit il y a quelques jours et j'ai trouvé ça assez juste : "Vous savez très bien gérer les talents car vous savez très bien les faire évoluer". On était ravis de ce que Julien Doré a offert sur 'The Voice Kids'. On le suit en fiction. On a accompagné depuis des années Jenifer et on la retrouvera dans un film de Noël en fin d'année, idem pour Sofia Essaïdi qui après "Star Academy" et "Danse avec les stars" a connu un énorme succès avec "La promesse". Ce dont je suis assez fier c'est que nos fictions quotidiennes sont également un réservoir de talents. Après avoir fait "Ici tout commence", Claire Romain va devenir l'une des héroïnes de "Cat's Eye", et Mikael Mittelstadt a joué dans "Les combattantes". Nous avons une réelle volonté d' accompagner les talents dans leur carrière.
La passerelle entre les plateformes et les chaînes historiques est de plus en plus visible. Pourquoi ?
Il n'y a pas d'accord cadre, il y a un dialogue avec les plateformes dans une volonté constructive de bâtir une industrie française forte mais aussi une plus grande circulation des programmes. Il y a un tel catalogue sur les plateformes que certains programmes sont très peu vus et en étant diffusés sur TF1 cela permet aux talents de toucher une audience plus importante, c'est également intéressant pour nous qui sommes très friands de nouveautés et de créativité.
"Les partenariats avec les plateformes permettent de pouvoir réunir un budget nécessaire pour des projets extrêmement ambitieux"
Vous accentuez également les co-productions avec elles, avec notamment "Cat's Eyes" en co-production avec Amazon...
Les partenariats avec les plateformes permettent de pouvoir réunir un budget nécessaire pour des projets extrêmement ambitieux, plus élevé que le budget moyen des fictions françaises de TF1. Ça nous permet également de développer et mettre à l'antenne des programmes qui auront une ambition internationale comme nous l'avons fait avec "Le Bazar de la Charité" et "Les Combattantes" et bientôt avec "Cat's Eyes". On réfléchit à d'autres projets. Tout le monde est gagnant, les plateformes ont accès à ces fictions avec le savoir-faire qui est le nôtre et ça nous permet de diffuser à l'écran des fictions extrêmement ambitieuses. Enfin ça permet aux talents d'avoir un rayonnement à l'international.
Les jeunes désertent la télévision linéaire. Mais les flux de TF1 restent puissants sur cibles. Comment l'expliquez-vous ?
On renouvelle nos grandes marques tout en conservant leurs fondamentaux. Ça passe par les talents et les coachs sur "The Voice", par le casting et le jury sur "Danse avec les stars" et "Mask Singer" et par la mécanique et les nouveaux aventuriers sur "Koh-Lanta". On essaye de donner une impulsion nouvelle à chaque saison avec pour objectif de surprendre les téléspectateurs mais aussi les candidats mais aussi d'être toujours en phase avec son temps. Si vous regardez l'écriture de "The Voice" en 2023, elle n'a rien à voir avec celle d'il y a dix ans, il n'y a plus de voix off, on montre beaucoup plus les coulisses, on est en prise avec le réel pour donner une dimension de moment présent. La façon de filmer a beaucoup changé, les profils des candidats aussi. Ça vaut aussi pour la fiction, le cinéma, etc..
La programmation de la rentrée va être complexe pour TF1. Comment allez-vous diffuser toutes vos franchises ?
Nous allons avoir une rentrée évènementielle avec la coupe du monde rugby. Et nous devons, de fait, adapter notre programmation. Deux franchises qui étaient plutôt diffusées à la rentrée ou en hiver ("The Voice Kids" et "Ninja Warrior") sont programmées cet été. "Ninja Warrior" a déjà été proposé l'été par le passé et il y a une vraie logique estivale à programmer ce divertissement en juillet et en août. En septembre et octobre il y aura en effet assez peu de cases du vendredi et du samedi pour du flux, elles seront occupées par du rugby. Mais nous proposerons de la fiction française et des séries étrangères.
"Si on a assez de matière pour faire des saisons All-Stars, oui il y aura deux saisons de "Koh-Lanta" par an. C'est en discussion avec la production"
Vous savez déjà ce que vous allez programmer le mardi soir à la rentrée ?
Non, et même si je le savais, je ne vous le dirais pas. (rire)
Reverra-t-on 2 saisons "Koh-Lanta" par an sur TF1 ?
Ça dépendra, si on a assez de matière pour faire des saisons All-Stars, oui. C'est en discussion avec la production. Certaines années, nous ne diffuserons qu'une seule édition, d'autres nous programmerons deux saisons. Les compétitions sportives peuvent aussi venir chambouler les programmations.
Il se murmure que la prochaine saison de "Danse avec les stars" pourrait être intégralement enregistrée...
On n'exclut rien. On étudie plusieurs pistes mais on n'a encore rien décidé à ce jour.
"HPI", "Star Academy" : Vous avez surpris cette saison en annonçant les dates de lancement de ces deux programmes des mois à l'avance. Pourquoi ?
On aime surprendre... (sourire).