Ecarté du "Grand Journal" avant le tsunami Bolloré, Jean-Michel Aphatie rebondira dès lundi sur Europe 1, aux commandes de "Europe Midi". Interrogé longuement dans Télé Obs cette semaine, l'ex-intervieweur politique de la matinale de RTL revient sur son éviction du talk de Canal+. Un départ contraint mais aujourd'hui digéré. "Ces dernières années, le côté rance, vieillot et nauséabond de la culture française a refait surface. Et RTL a en son sein un représentant de cette culture rance pour qui Canal+ et 'Le Grand Journal' n'est rien d'autre que l'expression de la bien-pensance, de l'esprit bobo et d'un certain gauchisme", lâche-t-il. Visé sans le nommer, Eric Zemmour, son ex-confrère sur RTL.
Jean-Michel Aphatie avoue regarder "avec un peu de tristesse" la récente reprise en mains de Canal+ par Vincent Bolloré, après l'éviction de Rodolphe Belmer, le patron de la chaîne, et de Renaud Le Van Kim, producteur historique du talk d'access. Mais il consdière, après neufs ans sur le fauteuil de l'émission, "avoir fait son temps". Il revient aussi sur le déclin de cette marque emblématique de Canal+, qui sera reprise à la rentrée par Maïtena Biraben et produite par une autre société, Flab.
"L'âge d'or de l'émission, c'est la saison 2006/2007. A cette époque, l'émission est le reflet de l'élégance individualiste. Elle résonne avec l'époque car la société française est sur ces rails-là, analyse-t-il. Nicolas Sarkozy en 2007 affirme quelque chose de cet ordre (...) La société tient une occasion historique de prendre un virage qu'elle a toujours refusé de prendre : mondialisation et compétitivité".
Selon le journaliste, la crise de 2008 a tout changé dans la perception qu'ont les téléspectateurs de l'émission. "La France se replie. 'Mon véritable ennemi, c'est la finance', dit Hollande. Mais la finance, c'est l'étranger ! Ce type de discours, ça veut aussi dire que 'Le Grand Journal' est passé de mode, explique-t-il. C'est désormais Eric Zemmour qui est à la mode. C'est l'antithèse de l'émission (il y sera pourtant très régulièrement invité, ndlr). Ce que représente l'émission, cette élégance individualiste, la tolérance, a été rejeté au profit des peurs qui montent et laissent penser qu'une forme de solidarité ("Les Français d'abord") doit désormais primer."
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Jean-Michel Aphatie revient aussi sans langue de bois sur son éviction de RTL, où il a mené très exactement 2.582 interviews depuis 2003. "Ce poste ne m'a jamais appartenu. Je n'ai rien à objecter au choix d'Olivier Mazerolle, cette décision me semble légitime, la discussion s'arrête là". Malgré la baisse d'audience de son quart d'heure, dépassé par Léa Salamé sur France Inter, Jean-Michel Aphatie estime que "ce n'est pas un argument pertinent". Pour lui, Christopher Baldelli, patron de la station, voulait du changement et il était le seul à pouvoir être remplacé. "Ca tombe sur moi, j'ai longtemps été dans la vitrine, c'est comme ça", conclut-il.