Interview
Jean-Louis Blot (Endemol France) : "On travaille au retour de 'Secret Story' et 'Loft Story'"
Publié le 16 décembre 2022 à 16:31
Par La rédaction
Après une année faste pour Endemol France ("Star Academy", "Masterchef", "DragRace France"), Jean-Louis Blot, le président du groupe audiovisuel, fait le bilan sur puremedias.com.
Le générique de la "Star Academy" 2022. © Endemol France
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L'heure est au bilan pour Endemol France. Après une année faste marquée par le retour de la "Star Academy" sur TF1, de "Masterchef" sur France 2, Jean-Louis Blot, le président du groupe audiovisuel, a accepté de revenir pour puremedias.com sur les temps forts de la célèbre boite de production. Et ils ont été nombreux. "Drag Race France", "Celebrity Hunted", "Lego Masters", "Les enfants de la télé", "LOL, Qui rit sort", etc. Interview sans langue de bois.

Propos recueillis par Ludovic Galtier et Benjamin Rabier

puremedias.com : France 2 a annoncé récemment que la saison 2 de "Drag Race France" pourrait être diffusée en prime. Heureux de cette promotion ?
Jean-Louis Blot : Je n'ai pas lu la même chose que vous. J'ai lu une interview d'Anne Holmes, patronne des programmes de France Télévisions, qui disait "pourquoi pas un lancement en prime". Elle n'a pas précisé si cela serait sur France 2, France 3, France 4 ou France 5 ou Culture box.

Ce serait quand même étonnant de lancer la saison 2 de "Drag Race France" sur France 3 ou France 4...
Je ne sais pas. Je ne suis pas dans la tête du diffuseur, je vous dis juste ce que j'ai lu. Elle n'a pas dit que ce serait forcément sur France 2. "Drag Race France" est une marque france.tv. La commande était pour la plateforme de France Télévisions et nous étions très contents de cela. A la base, c'est une émission pour la plateforme.

Est-ce que cette émission, de par sa construction, peut être diffusée à 21h sur France 2 ?
Je ne sais pas ce qu'est une émission de prime ou une émission de deuxième partie de soirée aujourd'hui. Surtout quand cette émission a été construite, à l'origine, pour une plateforme. On fait "Drag Race", France Télévisions diffusera ensuite l'émission dans la case horaire qui lui semblera la plus appropriée pour le programme. On ne fabrique pas "Drag Race" pour telle ou telle case horaire.

Quelles seront les nouveautés de la saison 2 ?
Un nouveau casting de drag queen (il sourit). Contractuellement, je ne peux rien vous dire de plus. L'année dernière, nous n'avions même pas le droit de révéler les célébrités invitées d'une semaine à l'autre.

"La moyenne d'âge des téléspectateurs qui ont regardé sur France 2 le premier épisode de "Drag Race France" était de 63 ans" Jean-Louis Blot

Est-il difficile d'adapter ce format très cadré aux Etats-Unis ?
Il y a des règles dans ce format-là qui sont immuables. On fabrique cette émission avec une société de production qui s'appelle "Shake Shake Shake" de Raphaël Cioffi qui connait par coeur le format. On respecte leur écriture. C'est très complexe car "Drag Race France" est aussi diffusée dans le monde sur la plateforme "WoW Presents Plus". Mais rassurez-vous, il y a quand même des spécificités françaises et les Américains ont adoré notre adaptation.

Comment expliquez-vous l'enthousiasme autour de la saison 1 ?
Il s'explique par plusieurs critères. Aujourd'hui, la télé est très souvent un robinet d'eau tiède. Là, on est sur un programme différent avec une identité très forte. Il y a eu un effet de curiosité, les gens voulaient découvrir ce monde qu'ils ne connaissaient pas. L'art drag était très peu connu en France. L'autre critère, c'est l'attachement au casting particulièrement réussi. Les gens ont eu envie de suivre chaque semaine les histoires fortes et attachantes de ces artistes. La sincérité et l'authenticité des drag ont créé un attachement très fort au programme.

La télévision doit-elle prendre plus de risques selon vous ?
Quand une chaine prend des risques, souvent, les téléspectateurs la gratifie. Quand TF1 relance la "Star Academy", le téléspectateur est là. Quand France Télévisions met "Drag Race" à l'antenne, le téléspectateur est là. "Les rencontres du Papotin", sur France 2, est aussi un bel exemple de prise de risque. Tous ces territoires-là sont particuliers, ne sont pas faits pour la télévision, a priori même clivants, attisent la curiosité des téléspectateurs. Les gens ont envie de voir des nouveautés et des choses différentes. On n'en a pas beaucoup parlé mais la moyenne d'âge des téléspectateurs qui ont regardé sur France 2 le premier épisode de "Drag Race France" était de 63 ans.

France 2 a diffusé l'intégralité de la saison 1 sur son antenne alors qu'elle ne devait programmer que le premier épisode. Est-ce qu'avec cette double exposition - sur le linéaire et la plateforme - Endemol a été davantage rétribué ?
Non. Chez Endemol on a vendu des droits à France Télévisions, qui a utilisé le programme comme il le voulait. Pour nous, en tant que producteur, plus le programme est exposé, mieux c'est.

Allez-vous augmenter le coût de la saison 2 ?
On a un budget supérieur pour la saison 2. Plus globalement, j'ai trouvé qu'il y avait un engagement très fort de France Télévisions pour ce programme. Si on m'avait dit, il y a deux ans, que France Télévisions allait mettre sur son immeuble une affiche géante avec des drag queens, je n'aurais pas parié beaucoup d'argent là-dessus.

"Le bilan de 'Masterchef' n'est pas si pourri que ça en J+7" Jean-Louis Blot

L'autre évènement d'Endemol cette année, c'était "Masterchef" sur France 2 qui s'est soldé par un échec...
"Masterchef" était un dossier complexe. On avait une marque qui revenait à l'antenne, sur une chaine différente, ce n'était déjà pas simple. Les programmes culinaires s'adressent plutôt a un public jeune et actif. Le public de France 2 en prime est un public un peu plus âgé. La difficulté était de faire venir un public plus jeune tout en conservant les habitués. Au final, les audiences des premières émissions sont moyennes mais la concurrence était très forte. Si TF1 avait programmé une série américaine, on aurait mieux marché. Là, on s'est retrouvé face à "Mask Singer" en fin de vacances scolaires. Le résultat est plutôt bon sur cibles. On rajeunit la case mais on perd une grande partie du public plus âgé de France 2 que l'on rattrape, en partie, avec un replay très très fort sur france.tv. En J+7, on est au-dessus des 2 millions de téléspectateurs et à 15% des Femmes responsables des achats de moins de 50 ans. Si je fais le bilan de toute la saison, ce n'est pas si pourri que ça en J+7. Plutôt bon même.

A LIRE AUSSI : Echec de "Masterchef" : Qu'est-ce que France 2 est allée faire dans cette galère ?

France 2 a annoncé que "Masterchef" ne reviendrait pas. C'en est fini de ce concept ?
Je ne jette pas le bébé avec l'eau du bain. On a manqué de puissance. Je regrette que l'on n'ait pas réussi à lui en donner plus. On aurait eu 300/400.000 téléspectateurs de plus, on serait en train de parler d'un succès. On n'est pas passé loin.

Réfléchissez-vous toujours à une nouvelle formule ?
France Télévisions doit avoir un programme qui traite du patrimoine culinaire française. C'est nécessaire. Nous avons pensé que "Masterchef" était une marque service public compatible et qu'on allait pouvoir créer un univers assez fort sur le service public.

France Télévisions doit faire face à des réductions de budget drastiques. Êtes-vous impacté en tant que producteur ?
Travailler avec France Télévisions est un vrai plaisir. On essaye de les accompagner là-dessus. On est un producteur engagé et si l'un de nos clients a des problèmes et des économies à faire, on va essayer de l'aider.

Comment cela se traduit-il ?
Nous pouvons en faire plus pour le même prix. Nous pouvons aussi demander au client de s'engager sur une durée plus longue pour qu'on puisse baisser notre prix. Il y a plein de possibilités.

"J'ai visionné les premiers montages de 'LOL, qui rit sort 3' et cette saison est géniale" Jean-Louis Blot

En 2023, vous allez lancer une troisième saison très attendue de "LOL, qui rit sort" sur Amazon Prime Video...
J'ai visionné les premiers montages et cette saison est géniale.

Comment avez-vous réussi à réunir ce casting aussi prestigieux ?
C'est un secret mais avant tout c'est Thomas Dubois et ses équipes chez Prime Video qui donnent envie aux différents talents de participer à ses émissions.

Beaucoup disent que les stars viennent pour l'argent...
Je ne pense pas. Je pense que c'est surtout l'idée de venir s'amuser ensemble. Contrairement à certains programmes télé, ce tournage est peu chronophage pour les célébrités donc c'est très intéressant. Et puis on veut y être dans "LOL, qui rit sort". Si vous saviez le nombre de coups de fil que je reçois de personnalités qui veulent participer à l'émission et qui seraient même prêtes à payer pour en faire partie... L'aspect financier existe mais il n'est pas aussi important que ça.

Est-ce que l'idée d'un All-Stars pourrait voir le jour ?
C'est top secret (il sourit). La marque appartient à Amazon Prime Video pas à Endemol.

Sur Amazon Prime Video, il y a aussi "Celebrity Hunted". Beaucoup pointent du doigt le manque de cohérence de l'émission. La législation française vous empêche, par exemple, de réellement filmer une chasse à l'homme...
Je ne vois pas pourquoi. On recrée ce qui pourrait se passer si on avait le droit de réquisitionner les caméras de surveillance en France. On ne prend pas celles qui existent certes, on installe les nôtres, mais c'est expliqué dès le début de l'émission. On donne accès à nos enquêteurs à tous les moyens qu'ils auraient pu avoir dans la vie pour réussir leur mission. Je peux vous dire qu'ils sont vraiment très énervés quand ils n'arrivent pas à attraper les célébrités.

Il y a quand même une part de scénarisation ?
Ce n'est pas de la scénarisation, c'est de la préparation. Quand on tourne dans la rue, je suis obligé de demander une autorisation.

Une saison 3 verra-t-elle le jour ?
Les derniers épisodes ont été mis en ligne vendredi dernier. Prime Video fera ses comptes et on espère avoir des nouvelles d'eux assez rapidement sur la suite de ce projet.

"Chez Endemol, on a identifié trois territoires, le sport, la musique et la mode, que les jeunes consomment énormément" Jean-Louis Blot

La saison 3 de "Lego Masters", diffusée sur M6 pendant les vacances de la Toussaint, affiche un moins bon bilan, cela vous inquiète ?
Non, ça a mieux marché sur les ménagères et sur les quatre ans et plus un peu moins. "Lego Masters" est massivement regardée par les 4/14 ans et pendant les vacances scolaires. À tel point qu'à 22 heures, il y a un décrochage car ce public-là va se coucher. On fait un très gros replay sur cette émission. La finale qui n'était pas diffusée en période scolaire a moins bien marché en effet, ça s'explique par l'emploi du temps des enfants. Mais on s'est rattrapé avec un très gros replay qui a fait près de 650.000 spectateurs supplémentaires.

Une saison 4 est-elle en vue alors ?
On espère. On est très content de cette émission.

En juin dernier, vous avez célébré les 12 ans des "12 coups de midi". Comment expliquez-vous la longévité de ce jeu ? Comment faites-vous pour que le concept ne s'épuise pas ?
Cette saison réalise des audiences exceptionnelles avec des pics d'audience qui peuvent aller jusqu'à 5 millions de téléspectateurs. La longévité de ce jeu est clairement dû au talent et à l'implication de Jean-Luc Reichmann. Il se questionne sans arrêt et tous les jours, il nous apporte de nouvelles propositions pour faire évoluer l'émission. C'est la recette du succès et de la longévité.

Depuis la rentrée, "Les Enfants de la télé" enchaine les records sur France 2. Comment avez-vous retravaillé la marque ? Quels sont les ingrédients de son succès ?
Cette saison est la meilleure depuis son arrivée le dimanche sur France 2. Ces 18 derniers mois, nous avons fait évoluer 'Les Enfants de la télé' vers une formule plus centrée sur les archives et les casseroles de nos différents invités. Nous pensons que les téléspectateurs le dimanche en fin d'après-midi, ont besoin de s'amuser et Laurent Ruquier et ses invités remplissent parfaitement cette mission.

"Quand je vois le succès des rencontres sportives des Youtubeurs sur Twitch (GP Explorer, Eleven All-Stars), je me dis qu'il se passe quelque chose" Jean-Louis Blot

Dans vos cartons, certains annoncent le retour de "Secret Story" sur Amazon Prime Video en 2023...
Je ne sais pas qui a sorti cette info mais c'est absolument faux.

Vous ne travaillez pas à un retour de ce programme ?
Si, on travaille au retour de "Secret Story", "Loft Story" ou à l'arrivée de "Big Brother". On est convaincu que c'est ce qui correspond à l'usage de la consommation des programmes télévisés aujourd'hui. Ces émissions permettent de créer du bruit sur les réseaux sociaux et sont consommables sur Instagram, Tik Tok, Twitter, Facebook ou Twitch. Elles conviennent à la SVOD, à l'AVOD et peuvent avoir des produits linéaires multiples (prime, quotidienne, deuxième partie de soirée). On est dans quelque chose de complètement protéiforme qui convient parfaitement à ce que doit être la télévision aujourd'hui. C'est marrant car ces émissions ont été inventées il y a 20 ans mais elles sont aujourd'hui parfaitement adaptées à la manière de consommer du contenu. Quelles émissions peuvent faire autant de contenus sur autant de supports différents aujourd'hui ? Aucune.

En 2023, une émission devra forcément penser réseaux sociaux pour exister ?
Si on veut toucher les 15-25 ans ? Oui. Ils ont déserté la télévision. Ils sont sur YouTube, Tik Tok, Twitch... La télévision est encore capable de créer l'évènement. Mais les réseaux sociaux vont amplifier cette caisse de résonance et faire venir un nouveau public. Quand un contenu sur la "Star Academy" est publié sur Tik Tok, cela cartonne sur une cible qui ne regarde pas forcément l'émission. Ces contenus nous permettent de toucher les jeunes. Chez Endemol, on a identifié trois territoires, le sport, la musique et la mode, que ce public-là consomme énormément.

Quelles sont vos prochaines pistes de réflexion pour la télévision ?
Quand je vois le succès des rencontres sportives des Youtubeurs sur Twitch (GP Explorer, Eleven All-Stars), je me dis qu'il se passe quelque chose. C'est du sport sans droits. Si nous pouvons produire un match de foot sans acquérir des droits, cela devient intéressant pour moi en tant que producteur. Il y a matière à réflexion. Je pense, par ailleurs, que tout ce qui est télé-réalité d'enfermement et en direct, permet de créer un écosystème nouveau. C'est vers ces directions que je veux aller.

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